Le terme de police de caractères désigne officiellement un ensemble complet, dans un corps donné, de caractères d'une même graisse et d'une même famille (d'un même dessin). Le terme anglais "font" utilisé souvent en informatique, PAO (Publication Assistée par Ordinateur) ou imprimerie, provient du mot français "fonte". En effet, à l'origine les caractères s'obtenaient par moulage du plomb fondu... L'ensemble d'un jeu de caractères faisait partie d'une même coulée, d'une même fonte.
Outre les multiples formats de polices de caractères, les termes du métier sont souvent utilisés différemment suivant les environnements, ce qui n'enlève rien à la confusion ambiante.
Les imprimeurs utilisent le terme "fonte" pour désigner spécifiquement des tailles de points, poids, graisse et styles sélectionnés dans une police comme dans une expression telle que "nous utilisons une fonte Times de 12 points dans ce document". Ainsi Times 12 points et Times 18 points sont pour eux des fontes, pas des polices. Par contre, dans le même contexte, Times Standard, Times Italique et Times Gras, font partie de la même famille, de la même police (la police Times), même si chaque désignation contient un jeu complet de caractères, dont les caractéristiques sont différentes.
Ajoutons un peu de technique. Pour encore compliquer le tableau, il faut distinguer deux catégories de polices, différentes par la manière dont elles sont "construites", ainsi que par leurs possibilités d'utilisation : les polices bitmap et les polices vectorielles, dites aussi "polices contour" (outline, en anglais).
En fait, avec les polices vectorielles qui peuvent se décliner directement en n'importe quelle taille ou graisse, la différence entre fonte et police n'est plus qu'une question de vocabulaire, ou de langue. En français, on parle de police, et de fonte en anglais.
Quel que soit le type de police utilisé, il ne faut pas oublier que moniteur et imprimante n'ont jamais les mêmes caractéristiques. Par conséquent, une même police n'aura pas le même aspect dans les deux cas. Si, au contraire, on désire obtenir le même aspect, il faut utiliser à la fois une police écran et une police imprimante, ou encore traiter selon deux modes différents une même police vectorielle, par exemple de type True Type...
En ce qui concerne les imprimantes, et en particulier les imprimantes laser haut de gamme, toutes les polices peuvent être, quelle que soit leur catégorie, au choix du fournisseur, disponibles en mémoire morte de l'imprimante, téléchargées depuis un disque de micro-ordinateur ou stockées dans des cartouches amovibles. Ce n'est plus le cas des imprimantes de type "personnel", peu coûteuses : dans ces machines simplifiées, toute la gestion de l'impression est réalisée par le processeur de l'ordinateur.
Enfin, dernier point, il y a imprimantes et imprimantes. Toutes les imprimantes n'ont pas des caractéristiques identiques, et la qualité du travail réalisé dépend en grande partie de l'imprimante utilisée...
Polices bitmap ("carte de points")
Une police bitmap est un ensemble de caractères décrits par des matrices binaires, des tableaux de points noirs ou blancs. Plus les caractères sont grands, plus il faut de points pour les décrire, et plus le fichier de la police est important. A titre indicatif, un Times gras, en corps 6 occupe approximativement 10 Ko. Le même Times en corps 12 occupe 26 Ko. Toujours en gras, mais en corps 24, le fichier occupe 80 Ko, et 256 Ko en corps 48...
Pour ce type de police, on a besoin d'autant de fichiers de description de police que de corps, de genre, de graisse... Pire, ces attributs se combinent ! Le Times italique gras de corps 12 est différent du Times romain (droit) gras de corps 12... et, de mieux en mieux, il peut être nécessaire de définir des polices différentes selon l'orientation de la feuille (portrait ou paysage). Les polices bitmap consomment donc beaucoup de place, et il convient d'en tenir compte en exploitation courante.
Une autre particularité des polices bitmap est qu'il est difficile de les utiliser dans des tailles autres que celles disponibles. Dès que l'on change la taille d'un caractère (en particulier si on tente de l'agrandir), il apparaît un "effet d'escalier" fort désagréable : les traits inclinés sont formés d'une série de "marches". En effet, lors de l'agrandissement, le logiciel se contente d'augmenter la taille des points constituant le caractère, en les remplaçant par des petits carrés, ainsi que le montre le dessin suivant...
Polices vectorielles
On appelle polices vectorielles, ou vectorisées, des polices dont le contour est considéré comme la juxtaposition d'arcs et de traits, chacun d'eux étant défini par une expression mathématique (ce qu'un "matheux" appelle un "vecteur"). On les nomme parfois aussi des polices "contour" parce que c'est bien le dessin des contours, internes et externes, de chaque caractère qui sont décrits de cette manière.
À partir d'une seule police de cette famille (en réalité à partir d'une seule série de définitions des caractères), le logiciel d'impression a la possibilité de définir, par des commandes "simples" (pour l'utilisateur...), d'autres descriptions de contours, des italiques, des caractères plus gras... Au stade final, ces caractères seront toujours traduits en bitmap, seul forme utilisable pour la visualisation ou l'impression, à l'écran ou sur l'imprimante. Seulement, l'avantage de cette technique vectorielle est pouvoir dessiner tous les cas possibles à partir d'un seul modèle, et donc d'occuper finallement moins de place pour le stockage. Une police vectorielle occupe beaucoup plus de place qu'une police "bitmap" isolée, mais nettement moins que toutes ses "déclinaisons", pour un résultat de meilleure qualité. Par contre, le travail d'impression s'en trouve compliqué, parfois ralenti, par la nécessité de reconstituer tous les éléments dont on a besoin. Voire de faire pivoter les caractères...
La tendance actuelle des logiciels est de faire de préférence appel à des polices vectorisées, tout en gardant la possibilité d'utiliser des polices "bitmap".
Polices de caractères et imprimantes laser
Une imprimante laser, quelle qu'elle soit, est dotée d'une mémoire (de 500 kilo-octets au minimum, et pouvant atteindre plusieurs mégaoctets), mais toujours limitée. C'est là que se constituent les "images" à imprimer. Chaque page est transformée en une vaste matrice binaire formée de l'image point par point des caractères et des graphismes à imprimer. En noir et blanc, et en 300 ppp (points par pouce), un centimètre carré est formé d'environ 14000 points. Une page de texte au format A4 nécessite habituellement une capacité mémoire d'environ 1 Mo, et plusieurs pour du graphisme en niveaux de gris. Pour la couleur, multipliez par le nombre de composantes : 3 ou 4...
Si les polices de caractères sont stockées en mémoire morte (sous forme d'une cartouche, amovible ou non), elles n'empiètent pas sur la mémoire vive de l'imprimante. En revanche, si elles sont téléchargées depuis le disque dur du micro-ordinateur, leur description vient s'inscrire dans la mémoire vive de l'imprimante, ce qui réduit d'autant l'espace libre pour élaborer l'image binaire de la page. Or, comme nous l'avons vu plus haut, une police en corps 12 occupe habituellement de 25 à 30 Ko... Si le "metteur en page" recourt à un grand nombre de polices, il n'est pas impossible qu'il manque de mémoire vive pour enregistrer la description de la page avant l'impression. Certaines imprimantes tournent cette difficulté à travers un "driver" qui utilise la mémoire vive de l'ordinateur, et travaille en tâche de fond...
Imprimante et imprimante...
L'utilisateur final doit aussi savoir qu'une même police de caractères ne sera que très rarement (pour ne pas dire jamais) interprétée d'une manière identique sur des imprimantes différentes, ou par des logiciels différents, à plus forte raison si on modifie les deux... Ainsi, il est exclu qu'une imprimante dite matricielle (c'est à dire en réalité mécanique) puisse donner le même résultat qu'une imprimante laser : la définition est trop différente... Quel que soit le soin apporté à un document, le fait de changer d'imprimante change sa présentation. Dans tous les cas, la qualité "brouillon" ou la qualité "matricielle" est suffisante pour relire un texte (orthographe, syntaxe...) mais dès qu'il s'agit de préparer une édition "définitive" il est nécessaire de passer sur la qualité supérieure dite "texte" ou "courrier", ou mieux, sur une imprimante laser.
De plus, des logiciels différents peuvent utiliser les mêmes polices de caractères de manières différentes, d'où parfois des surprises lors d'un banal "copier/coller"... Le problème est encore plus évident lorsqu'il s'agit de traduire un document d'un ordinateur à un autre. Si dans la majorité des cas les enrichissements sont transférés, il arrive que la police soit systématiquement remplacée par une autre... C'est, à plus forte raison, le cas lors d'un changement de système (transfert de Macintosh à PC ou de PC à MAC). Retenez que chaque fois qu'il y a un changement de système, de logiciel, d'imprimante, il sera nécessaire de vérifier au minimum la mise en page du nouveau document... parfois de la recommencer.
Dans tous les cas, quel que soit le système utilisé, il faut se méfier (comme de la peste) des logiciels qui installent leurs propres polices, sans demander l'avis de l'utilisateur. Mis à part certaines polices rendues obligatoires par la présence de tel ou tel "accessoires" nécessaires, comme un éditeur d'équation, il faut considérer ces pratiques avec la plus grande méfiance. Au mieux, cela risque d'encombrer inutilement le disque dur et la mémoire, au pire, de faire disparaître vos polices préférées, au profit d'autres de même nom mais de dessin différent.
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Dernière mise à jour le 05/02/99 par Didier VIRION